Rédigé par Benjamin Terrier & Loïc Guillevin, Service de médecine interne, Centre de Référence National pour les Vascularites systémiques, Hôpital Cochin, AP-HP, Paris (juin 2014)
Que sont les vascularites systémiques ?
On désigne sous le terme de vascularites systémiques un groupe de maladies caractérisées par une atteinte des vaisseaux sanguins. Les parois de ces vaisseaux sanguins sont le siègne d'une inflammation se traduisant par un rétrécissement ou une obstruction de ces vaisseaux, gênant alors le passage du sang vers les différents organes. Ces vascularites sont classées selon la taille des vaisseaux sanguins concernés par cette inflammation. On entend par vaisseaux sanguins de gros calibre, l’aorte et ses principales branches de division. Les vaisseaux sanguins de moyen calibre sont les principales artères amenant le sang aux organes, ainsi que leurs branches de division. Les vaisseaux sanguins de petit calibre regroupent les plus petits vaisseaux appelés artérioles, capillaires et veinules.
Combien de personnes en sont atteintes et qui peut être atteint ?
La prévalence des vascularites (nombre de personnes atteintes de la maladie dans une population donnée) et le profil des patients atteints par ces maladies sont variables selon le type de vascularite.
Par exemple, la vascularite à immunoglobulines A (anciennement appelée purpura rhumatoïde) est une maladie essentiellement pédiatrique survenant avant l'âge de 15 ans, avec une prévalence d'environ 1 cas pour 5 000 enfants, tandis que l'artérite à cellules géantes (ou maladie de Horton) est une maladie touchant les sujets de plus de 60 ans avec une prévalence d'environ 1 cas pour 11 000 adultes.
A quoi sont-elles dues ?
Les causes des vascularites ne sont pas connues, à l'exception de rares cas où elles sont provoquées par des infections chroniques, comme le virus de l'hépatite C. Les mécanismes expliquant la survenue de ces maladies sont complexes et impliquent de nombreux dysfonctionnements du système immunitaire. Un rôle combiné d'un terrain génétique particulier (sans qu'il s'agisse pour autant de maladies génétiques), de facteurs de l'environnement (comme des expositions particulières à des toxiques), et de dysfonctionnements du système immunitaire sont fortement suspectés.
Sont-elles contagieuses ?
Les vascularites ne sont pas des maladies contagieuses. Il existe en revanche de rares formes de vascularites associées à des infections virales ou bactériennes, qui justifient alors des mesures particulières selon le type d'infection en cause.
Mes enfants peuvent-ils l’avoir ?
Les vascularites ne sont pas des maladies génétiques transmises des parents aux enfants. Même si le terrain génétique des patients, c'est-à-dire l'ensemble des gènes hérités des différents parents, peut jouer un rôle favorisant pour développer une vascularite, il n'est pas suffisant à lui tout seul pour déclencher une vascularite. Cela est démontré par le fait que les formes familiales de vascularite sont exceptionnelles.
Quelles sont les manifestations cliniques ?
Les vascularites peuvent toucher de nombreux organes, expliquant pourquoi elles sont considérées comme des maladies systémiques.
Les vascularites se présentent habituellement au début par des symptômes généraux (fièvre, amaigrissement, fatigue, perte d'appétit), et parfois des douleurs musculaires et/ou des articulations. Ensuite, d'autres manifestations plus spécifiques des vascularites peuvent apparaître, en fonction des organes concernés par l'inflammation de la paroi des vaisseaux sanguins. Le nombre de manifestations cliniques chez les patients est très variable d'un patient à un autre.
Atteinte des reins
Une proportion importante des patients avec une vascularite a une atteinte des reins, sous la forme d'une atteinte des vaisseaux sanguins irriguant les reins ou des filtres dans lesquels passent le sang (appelés glomérules). Les anomalies les plus fréquentes sont un excès de protéines dans les urines (protéinurie) ou la présence de sang dans les urines (hématurie). Une augmentation de la créatinine dans le sang, reflétant l'état de la fonction des reins, peut également s'observer. En l'absence de traitement, l'atteinte des reins peut évoluer vers une perte de la fonction des reins (insuffisance rénale), nécessitant alors la mise en place d'une dialyse.
Atteinte des poumons
Une inflammation des alvéoles pulmonaires peut s'observer chez les patients atteints de vascularite. Les symptômes sont alors une toux, un essoufflement, une douleur dans la poitrine, ou des crachats contenant du sang lors d'un effort de toux. Ce saignement peut être particulièrement sévère à l'origine de difficultés très importantes pour respirer.
Atteinte du nez et des sinus
Une inflammation du nez et des sinus est fréquente au cours de certaines vascularites. Elle se manifeste par une sensation de nez bouché, des croûtes lors du mouchage, des saignements de nez (épistaxis), ou des douleurs au-dessus ou au-dessous des yeux (sinusites).
Atteinte des articulations et des muscles
Les douleurs des articulations (arthralgies) et des muscles (myalgies) sont fréquentes. Les articulations sont alors rouges, chaudes, douloureuses et enflées. Les douleurs musculaires sont, quant à elles, diffuses et souvent intenses.
Atteinte de la peau
L'atteinte de la peau se manifeste le plus souvent par des petites taches rouges (appelées purpura), présentes au niveau des membres inférieurs le plus souvent. Ces tâches peuvent se nécroser et former des plaies de taille variable appelées ulcérations. Des plaques en relief ou non, de couleur rouge ou violacé, ou des lésions arrondies perceptibles sous la peau et douloureuses, sont également possibles.
Atteinte neurologique
L'atteinte neurologique peut concerner à la fois le cerveau et/ou la moelle épinière (appelés système nerveux central) et les nerfs périphériques qui transmettent l'information au cerveau.
L'atteinte du système nerveux central peut avoir des conséquences graves comme un accident vasculaire cérébral dû à une souffrance du cerveau par manque d'oxygène, ou à une hémorragie cérébrale par rupture d'un vaisseau sanguin.
L'atteinte des nerfs périphériques (neuropathie périphérique) se manifeste par des sensations anormales à type de fourmillements ou de picotements, une baisse de la sensibilité au toucher et/ou une baisse de la force des muscles des membres.
Atteinte intestinale
L'atteinte des intestins est à l'origine de douleurs souvent importantes de l'abdomen, de nausées, de vomissements ou de diarrhées parfois sanglantes. Rarement, les vascularites peuvent entrainer des ulcères dans la paroi des intestins et aboutir à une perforation. Ces atteintes peuvent mettre la vie en danger si un traitement souvent chirurgical n'est pas débuté en urgence.
Atteinte des yeux
Les vascularites peuvent provoquer des inflammations des yeux, se manifestant par des douleurs et des rougeurs des yeux, et parfois par une baisse de la vision. Toutes les enveloppes des yeux peuvent être touchées (sclérite, kératite, uvéite).
Atteinte cardiaque
Les manifestations cardiaques sont rares mais graves. Cette atteinte peut se manifester par des douleurs au niveau du thorax, des battements irréguliers du cœur (arythmie), ou une baisse de la fonction cardiaque à l'origine d'un essoufflement et d'une diminution de la quantité de sang délivrée aux organes.
Quelle est leur évolution ?
Les vascularites sont des maladies qui peuvent avoir des conséquences graves, en raison de l'atteinte de certains organes, comme les reins, les poumons, les intestins ou le cœur. Cependant, si la maladie est diagnostiquée à son début, un traitement approprié permet la disparition des manifestations de la maladie dans la majorité des cas. Des rechutes sont parfois possibles selon le type de vascularite. Le diagnostic de ces rechutes est en général plus rapide à faire, la maladie étant déjà connue.
Comment fait-on le diagnostic ?
Le diagnostic des vascularites est souvent difficile car les manifestations initiales sont souvent peu spécifiques. C'est l'association des manifestations cliniques évocatrices et des résultats des examens complémentaires (analyses de sang, analyses d'urine, examens d'imagerie, biopsies) qui conduisent le médecin à évoquer ce diagnostic et à adresser les malades vers un centre spécialisé pour poser le diagnostic, évaluer la gravité de la maladie et choisir le traitement le plus adapté.
Quels sont les examens complémentaires nécessaires ?
Les examens complémentaires comprennent des analyses de sang, des analyses d'urine, des examens d'imagerie et des biopsies de lésions.
Les analyses de sang permettent de mettre en évidence la présence d'une inflammation, se traduisant par une augmentation des globules blancs et de la protéine C-réactive, une anémie éventuelle se traduisant par une baisse du taux d'hémoglobine, et une atteinte de la fonction des reins se traduisant par une augmentation de la créatinine. Les analyses de sang permettent également de rechercher certains marqueurs orientant le médecin vers le diagnostic de vascularite, comme les anticorps dirigés contre les polynucléaires neutrophiles (ANCA) ou la cryoglobuline qui est un anticorps qui précipite au froid.
Les analyses d'urine permettent de déceler la présence anormale de protéines et/ou de sang, traduisant l'inflammation au niveau des reins.
Les examens d'imagerie recherchent des anomalies au niveau des sinus, des poumons, des intestins, du cerveau ou du cœur, organes atteints au cours des vascularites.
Enfin, la réalisation de biopsies est souvent nécessaire pour confirmer le diagnostic de vascularite. Une biopsie consiste à réaliser sous anesthésie un prélèvement d'une zone atteinte par la vascularite dans le but de l'examiner au microscope. La présence d'une inflammation de la paroi des vaisseaux sanguins permet alors de poser le diagnostic de vascularite.
Peut-on prévenir son apparition ou la dépister ?
On ne peut habituellement pas prévenir l'apparition de ces vascularites, à l'exception des formes associées à une infection chronique, où le traitement de cette infection peut empêcher l'apparition de la maladie (par exemple dans le cas des vascularites provoquées par le virus de l'hépatite C).
Le dépistage des vascularites est en revanche possible de manière précoce, dès que des manifestations cliniques évocatrices sont observées.
Le traitement
Existe-t-il un (des) traitement(s) médicamenteux ?
Plusieurs traitements médicamenteux sont utilisés au cours des vascularites, dans le but de réduire l'inflammation présente dans la paroi des vaisseaux sanguins. Le traitement classique repose sur un traitement à base de corticoïdes, associés ou non à un traitement immunosuppresseur.
Les corticoïdes sont des anti-inflammatoires très puissants qui permettent de contrôler l'inflammation observée au cours des vascularites. Ils sont en général administrés à fortes doses et pour une durée prolongée, souvent supérieure à 1 an, mais les modalités d'administration des corticoïdes sont variables selon le type de vascularite.
Les immunosuppresseurs sont des médicaments qui permettent de réguler le système immunitaire et de limiter son activité exagérée et inadaptée, lorsque les corticoïdes seuls ne permettent pas de calmer la maladie ou que les manifestations en rapport avec la vascularite sont particulièrement graves. On utilise différents immunosuppresseurs selon le type de vascularite et la gravité de la maladie. Comme pour les corticoïdes, ils sont en général administrés pour une durée prolongée, souvent supérieure à 1 an.
De nouveaux traitements sont en cours d'évaluation grâce aux importantes recherches effectuées dans le monde sur les vascularites.
Dans le cas des vascularites associées à une maladie infectieuse, comme l’infection de l’hépatite C, l’éradication de l’agent infectieux est le plus souvent une étape indispensable dans la prise en charge thérapeutique, avec souvent une moindre utilisation des traitements à base de cortisone ou immunosuppresseurs.
Existe-t-il d’autres traitements ou mesures que le patient puisse faire ?
Les principales mesures thérapeutiques sont médicamenteuses. Cependant, les patients peuvent largement contribuer à la bonne évolution de leur maladie sous traitement.
S'agissant de maladies chroniques, la bonne prise des traitements médicamenteux et la venue régulière aux consultations médicales sont des éléments déterminants pour la bonne évolution.
Il est également recommandé d'avoir une hygiène de vie très saine, avec notamment un régime équilibré en cas de corticothérapie prolongée. Le maintien d'une activité physique et professionnelle est également, dans la mesure du possible, souhaitable.
Que peut-on espérer de ces traitements ?
Grâce aux traitements initiaux (appelés traitement d'attaque ou d'induction), les manifestations en rapport avec la vascularite régressent le plus souvent rapidement et permettent d'obtenir la rémission de la maladie, c'est-à-dire une phase sans aucun signe d'activité de la vascularite. Il est cependant nécessaire de poursuivre un traitement au long cours (appelé traitement d'entretien) afin de réduire le risque de rechutes de la maladie, variable selon le type de vascularite. Un suivi régulier des patients est donc justifié pendant de nombreuses années.
Y-a-t-il des effets indésirables de ces traitements ?
Les médicaments utilisés au cours des vascularites peuvent entraîner des effets indésirables.
Les effets indésirables attribuables aux corticoïdes sont dépendants de la dose et de la durée d'administration. Il s'agit le plus souvent d'une prise de poids avec une accumulation de graisses au niveau de certaines zones du corps, d'un déséquilibre des taux de sucre dans le sang, d'une hypertension artérielle, d'une fragilité des os (appelée ostéoporose), de troubles de l'humeur et du sommeil, et d'une risque augmenté d'infections.
Les immunosuppresseurs ont aussi des effets indésirables potentiels. Ils ont tous en commun une augmentation du risque d'infections justifiant une attention particulière des patients, et une consultation en urgence chez son médecin traitant en cas de fièvre. Ensuite, les effets sont variables selon le type d'immunosuppresseurs. Le cyclophosphamide peut entraîner des irritations de la vessie et diminuer la fertilité chez les femmes en âge de procréer. Le rituximab peut donner des réactions allergiques pendant et au décours de la perfusion. L'azathioprine et le méthotrexate peuvent donner des irritations du foie et une baisse des globules rouges et globules blancs.
Un soutien psychologique est-il nécessaire ?
Un soutien psychologique peut être souhaitable, un diagnostic de maladie chronique pouvant provoquer des angoisses. Le retentissement sur la vie quotidienne et les effets indésirables des traitements peuvent également être mal vécu.
Quels sont les conséquences de la maladie sur la vie quotidienne (sociale, professionnelle, familiale…) ?
L'impact des vascularites sur la vie quotidienne varie en fonction des manifestations de la maladie et de leur sévérité. La prise en charge initiale et la mise en route du traitement sont souvent source d'inquiétude pour les patients, et les différentes manifestations responsables d'une fatigue importante et d'une tolérance parfois moins bonnes aux activités physiques. Le retentissement sur la vie sociale, personnelle ou familiale peut ainsi être important. Lorsque la maladie est correctement contrôlée, la vie peut en revanche devenir proche de la normale voire normale.
Comment se faire suivre pour la maladie ?
Le suivi des personnes atteintes de vascularites se fait par des médecins compétents dans la prise en charge de cette maladie (médecins internistes et/ou spécialistes d’organe). Le suivi de ces maladies se fait de manière très régulière afin de s'assurer de l'efficacité et de la bonne tolérance du ou des traitements entrepris. Cette surveillance est clinique, mais également biologique avec des analyses de sang et d'urines, et enfin radiologique avec la réalisation de radiographies, échographies, scanners ou imageries par résonance magnétique (IRM)
Quels sont les signes à connaître qui nécessiteraient de consulter en urgence ?
Les manifestations cliniques ou biologiques nécessitant une consultation en urgence sont variables selon le type de vascularite. Cependant, ces manifestations sont celles qui, en l'absence de prise en charge en urgence, pourraient mettre en jeu le pronostic vital ou le pronostic fonctionnel de l'organe atteint.
Parmi ces manifestations, il est important de noter :
- des difficultés respiratoires
- des crachats sanglants
- des douleurs abdominales intenses et/ou un saignement au niveau intestinal
- des troubles neurologiques à l'origine de perturbations de la force musculaire ou de baisse de la sensibilité
- une insuffisance rénale définie par une augmentation de la créatininémie sur le bilan sanguin
Où en est la recherche ?
La recherche sur les vascularites systémiques tente de mieux comprendre les mécanismes en cause dans la maladie et d'améliorer les traitements. Ces recherches sur les traitements et les mécanismes à l'origine de ces vascularites sont très actives au niveau international et au niveau national.
En France, le Groupe Français d'Etude des Vascularites (GFEV) et le Centre de Référence National pour les Vascularites systémiques, dirigés par le Pr Loïc Guillevin (Hôpital Cochin, Paris), conduisent des études thérapeutiques et physiopathologiques.
Y-a-t-il des associations de patients ayant cette maladie ?
L'association de patients "Wegener infos et autres vascularites" apporte une aide aux patients et aux familles de patients atteints de vascularites, et participent également activement à la recherche médicale en collaboration étroite avec le Groupe Français d'Etude des Vascularites.
Peut-on avoir une prise à charge à 100% ?
Les vascularites systémiques font partie dans la grande majorité des cas des affections de longue durée, donnant droit à une prise en charge 100% des frais médicaux liées à la maladie, d'une part en raison des traitements entrepris et d'autre part en raison du suivi clinique et biologique rapproché.
C'est le médecin traitant qui remplit et signe le formulaire de demande, appelé protocole de soins.
Les malades en situation de handicap dans leur vie quotidienne peuvent s'informer sur leurs droits et les prestations existantes auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) de leur département.
Pour obtenir d’autres informations sur cette maladie, contactez Maladies Rares Info Services au 01 56 53 81 36 (appel non surtaxé) et www.maladiesraresinfo.org